Pamela Hute : à la poursuite du « Bandit »

Ce bandit a été long à attraper et à ficeler. Et pour cause : incisif et mélodique, rock et pop, à l’identité très marquée et aux arrangements farouches, il respire à la fois les grands espaces sonores et les petits recoins confinés. Pas facile, dans ces conditions, de le mettre en boîte aussi vif qu’il le mérite. Mais tenace et perfectionniste, Pamela Hute n’a rien lâché. La jeune femme n’aura jamais aussi bien chanté que pour son voyou à la mâchoire rugueuse mais au cœur tendre. Elle nous avait séduit en 2009 avec « Turtle Tales From Overseas », elle nous convainc aujourd’hui avec « Bandit ».

Quelle est la difficulté au moment où l’on aborde un deuxième album ?

C’est le fait d’avoir une référence. On fait un premier album de manière assez détendue en fait, le deuxième c’est une autre histoire. Ce n’est pas forcément l’attente des autres qui met la pression, même si évidemment on voudrait que les gens aiment le disque. C’est surtout de moi dont il s’agissait. J’avais envie de faire mieux qu’avant. Et puis j’ai changé donc j’avais besoin que ça me représente aussi. Ce qui m’a pris autant de temps, c’est de retrouver un côté instinctif, je me posais beaucoup de questions, alors forcément je n’abordais pas les chansons de la même manière, c’était très cérébral. Mon angoisse a été là pendant un bout de temps, je sentais que cela m’échappait et que je n’étais pas en train de faire un truc qui était à moi. Puis, au bout d’un moment, j’ai trouvé le déclic. Mais cela a pris du temps. Je dis tout le temps que j’ai fait mon premier deuxième disque. C’est vraiment ça : j’apprends en permanence. Et finalement, ce qui est marrant c’est que c’est un disque qui est assez joyeux, alors que quand il a fallu le faire j’en ai bavé gravement.

Il a en effet un côté plus lumineux que le précédent. Et même si vos deux obsessions sont toujours présentes, à savoir la mélodie et l’énergie, il est également plus pop.

C’est vrai. C’est aussi que ce disque est sûrement plus travaillé que le premier. Il est moins brut. Il m’a pris deux ans et demi, voire trois et il a une drôle d’histoire. Il a été fait puis refait, ré enregistré, remixé… Cela a été un vrai parcours difficile. On dit souvent qu’on n’est jamais vraiment satisfait de son disque, mais là je suis vraiment contente maintenant.

Le fait que tout le monde parle justement d’un disque qui a été refait trois fois avant d’aboutir, ça n’est pas pesant ?

Non, parce que c’est ce qui fait aussi son charme. Le côté « on a fait des erreurs, on s’est trompé de chemin, on a refait les choses » me paraît très naturel. Du coup, l’ayant vécu je l’ai exprimé. Tous les artistes ne l’auraient sûrement pas fait. Puis, ça montre aussi qu’un album ce n’est pas juste le fait de jouer des chansons et de rentrer chez soi. C’est compliqué, il faut trouver les bonnes personnes, il faut faire le disque qu’on a envie de faire.

L’une des bonnes personnes qu’il a fallu trouver d’ailleurs est l’américain John Angello (Dinosaur Jr., Sonic Youth…) qui a posé le mix final chez lui, à New York. Vous en parlez beaucoup et mettez son travail très en avant…

Parce qu’il est indéniable qu’avant et après son passage les choses se sont transformées. Il a changé la face de l’album, a vraiment mis le point final et trouvé le truc qui manquait. En plus il a une culture musicale qui répond réellement à ce que je défends. Ce qui était super c’est qu’avant son arrivée on était enfin contents des prises mais qu’on ne sentait pas le mix. On a donc dû décider de confier ça à quelqu’un, ce qui pour moi est déjà difficile ! Et là, cette personne porte soudainement un regard complètement lumineux et le disque devient presque différent. C’est une expérience forte.

Les textes sont souvent remplis du thème de la fuite mais la manière d’écrire est bien plus assise qu’avant, guide bien plus l’auditeur et est même teintée d’une jolie ironie parfois…

Ça me fait plaisir que cela s’entende. Souvent j’écris les textes en ayant des images en tête, comme une vision un peu cinématographique. Et cette fois je voyais une imagerie esthétique qui incluait l’aventure et la fuite, en effet. Rien que le début de l’album avec Just Like This, par exemple, c’est l’histoire d’un garçon qui part de chez lui. Je me suis rendue compte que même si ce n’était pas du tout précisé, il y avait ce thème qui revenait dans les morceaux. Il y avait un fil conducteur qui s’était dessiné. D’où le nom de « Bandit » d’ailleurs.

Propos recueillis par Marjorie Risacher


Pamela Hute – session acoustiquepar RIFFX_fr