Oxmo Puccino : Le géant sensible du rap

Avec la sortie de son sixième album solo « Roi sans carrosse » le rappeur du xixe arrondissement parisien impose une nouvelle fois sa touche unique dans le PRF (Paysage « Rappologique » Français). Portrait d’un géant du mot.

Oxmo Puccino, avant d’être une voix c’est un physique, une gueule de Gabin de Paris pimenté malien. Une carrure de boxeur qui contraste avec la douceur de sa voix et la délicatesse de ses textes. Le contraste, les clairs obscurs et les chemins de traverse sont d’ailleurs les maîtres mots de son parcours.

Le grand public le découvre en 1997 avec Mama Lova. Premier tube de rap en forme d’hommage maternel sorti sur le label marseillais du DJ d’IAM. Déjà un contre-pied pour le Parisien qui a débuté aux côtés de Booba.

Du rap au jazz

Son écriture subtile le place déjà en marge de la scène rap française : ni en haut, ni en bas juste ailleurs. La vie d’artiste n’étant pas un fleuve tranquille, il alternera succès (« Opéra Puccino ») et échec commercial (« L’amour est mort ») malgré son hilarant Tango des belles dames. Peu importe, il impose peu à peu la poésie de ses textes.

En 1999 il compose la BO du film Petits Frères du cinéaste Jacques Doillon. Le titre L’enfant seul est sans doute l’un des plus beaux textes jamais écrits dans le rap français. Fidèle au passement de jambe, l’ex Time Bomb sort « Le Cactus de Sibérie ». Bel oxymore pour un retour aux fondamentaux du rap.

Oui mais voilà, un artiste digne de son renom ne s’endort pas sur ses lauriers. Oxmo va alors signer un album-concept chez Blue Note (mythique label US de jazz) intitulé « Lipopette bar ». Il un rend un hommage vibrant à la diva jazz Billie Holiday avec les Jazzbastards. Avec cet album, il réussi à conquérir un public jusque-là insensible au rap.

Le roi des mots

Son essai suivant « L’arme de paix » le propulse alors logiquement au rang des plumes qui comptent et qui pèsent : Victoire de la musique du meilleur album de musique urbaine, reconnaissance commerciale et tournées sold out. Ses duos avec Olivia Ruiz, Ben l’oncle Soul et K’nan enfoncent le clou de son éclectisme et on entend de plus en plus souvent : « J’aime pas le rap sauf Oxmo Puccino. »

Oxmo, un pied dans la rue (il se produit dans de nombreuses mixtapes), l’autre dans le showbizz le plus bling-bling (collaboration avec Florent Pagny ou encore Alizée) se nourrit des deux mondes.

Le joyau de la couronne

Le voilà donc aujourd’hui au volant de son « Roi sans carrosse ». Cet album restera comme un classique du rap français. Surprenant par les angles des thèmes choisis (héros mais de la vie quotidienne, sexualité mais frustrée, violence qu’on a pas utilisé) portée par une bande son vraiment originale (violon, guitares électriques ou accordéon par exemple) son sixième album sonne comme un bijou.

Reste à savoir où s’arrêtera sa progression. Quand un artiste ouvre aussi grand les portes d’un style, il ne peut que se faire doubler par des plus jeunes. Possible qu’il devienne alors un roi sans trône. Mais d’ici là, bonne chance aux autres…

Willy Richert

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