Booka Shade : Eve

Que cette histoire débute mal : comment, en 2013, peut-on commencer un album en singeant Saint Germain (saxo + rythme de deep house) tout en samplant Jimmy Cliff et son Many rivers to cross ? Le temps se serait-il arrêté en 1998 pour le duo allemand ? Walter Merziger et Arno Kammermeier viennent-ils de sortir de leur grotte ? Pourquoi tant de haine pour le Rastaman ? On continue l’écoute, on s’accroche et enfin l’illumination est là ! Booka Shade se fiche de la mode, du dernier truc tendance comme Paris Hilton, oublient le dernier Goncourt (excellent d’ailleurs !). Leur truc à eux, c’est ce qu’on appelle la tech-house mélodieuse. Ça bouge mais pas trop, c’est mélodieux sans être trop pop. Depuis vingt-cinq ans, Booka Shade défend sa vision de leur art. Et pourquoi pas ? Reproche t-on aux Rolling Stones de revisiter éternellement le blues ? Reproche t’on à Céline Dion de nous enduire les oreilles de miel depuis trente ans ? Pourquoi en serait-il autrement dans la musique électronique ? Alors oui cet album n’est pas révolutionnaire, oui certains titres frôlent l’easy-listening (Maifeld) mais on ne lui enlèvera pas la qualité de production (Love Drug, Jesolo), le respect d’une certaine école old-school et au final une sincérité touchante. Question : un producteur branché opportuniste mérite t’il un meilleur traitement que des musiciens qui labourent honnêtement leur sillon ?

Willy Richert

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Booka Shade – Love Inc